Dans l’actualité politique ivoirienne, il y a cette petite phrase de Laurent Gbagbo qui remet les pendules à l’heure: « J’ai écouté un rigolo dire aux jeunes de ne pas descendre dans la rue pour des hommes politiques, si ceux-ci ne participent pas avec leurs familles. Moi, j’ai fait de la prison en 1992, après une marche, ma femme était là-bas, mon fils aussi ».
Dans mon livre « Mes années Houphouët », je raconte cet épisode critique que les jeunes générations ivoiriennes ne connaissent pas forcément: la marche du 18 février 1992, l’arrestation des opposants, en vertu de la loi anticasseurs prise par le Premier ministre d’alors Alassane Ouattara, loi qui rend les organisateurs d’une manifestation directement responsables des débordements, qu’ils soient l’œuvre des intéressés eux-mêmes ou de… personnes infiltrées.
Lorsque j’ai été incarcéré à la Maca, deux mois plus tard, pour avoir dénoncé, pour le principe, en direct à la RTI (télé), l’emprisonnement de ces hommes et de ces femmes, mes codétenus m’ont raconté que le soir où Gbagbo a été écroué, toute la prison a résonné d’une immense clameur : « Gbagbo président ! Gbagbo président ! »
Ma rencontre avec Laurent Gbagbo a lieu plus tard. Voilà ce que j’écris dans le livre à ce sujet : « Jeudi 21 mai 1992. Laurent Gbagbo demande à me voir. Je ne le connais pas. J’ai tout au plus lu un de ses livres, et bien que refusant de me laisser embrigader dans un parti, je partage son combat pour l’avènement de la démocratie en Côte d’Ivoire.
Je me rends donc à son invitation dans sa cellule. Gbagbo m’embrasse chaleureusement et me présente à ses compagnons. On parle longuement des choses du dehors et finalement peu de politique. On rit surtout beaucoup. J’ai vraiment le sentiment de vivre un moment de l’Histoire de la Côte d’Ivoire ».
Qu’on aime ou pas Laurent Gbagbo, dont on peut évidemment critiquer l’action publique, comme pour tout politicien, il n’en reste pas moins un homme courageux qui a déjà laissé une trace dans la vie de ce pays.
Perso, je trouverais plus sage que Laurent Gbagbo et Alassane Ouattara passent la main aujourd’hui. Mais pour moi, si Gbagbo doit prendre sa retraite politique, cela doit procéder d’un acte volontaire et non pas d’une manoeuvre judiciaire.
Source: Page Facebook.