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Eco et politique

Nouveau gouvernement ivoirien : Entre confiance et méfiance (Le décryptage de F. M. Bally)

Le nouveau gouvernement ivoirien, formé le 17 octobre 2023, a fait sa rentrée officielle le lendemain. Il n’a pas échappé, sur les réseaux sociaux, aux obséquiosités de deux de ses membres. La joie du nouvel entrant, Jacques Assahoré Konan, a été débordante. De la direction du Trésor et de la Comptabilité publique, il devient ministre de l’Environnement, du Développement durable et de la Transition écologique. Il récolte les fruits de son succès électoral aux régionales du 2 septembre 2023 dans le Gbèkê et doit semer les graines du basculement du V baoulé dans le RHDP.

Mais, c’est l’explosion de contentement de Kobenan Kouassi Adjoumani, qui apparaît surprenante. D’une part, de tous les membres de la nouvelle équipe, il est un ministre de carrière, qui établit un record de longévité: ministre de 2002 à 2005, sous Laurent Gbagbo, il a rejoint, sous Alassane Ouattara et sans discontinuer, le gouvernement depuis juin 2011.

D’autre part, sa profession de foi, après sa reconduction comme ministre d’État, ministre de l’Agriculture, du Développement rural et des Productions vivrières, est venue rappeler qu’il y anguille sous roche.

« Je voudrais dire merci au président de la République et prendre l’engagement devant tout le monde que, jamais, je ne le trahirai. Je lui suis fidèle, » s’est-il exprimé pour espérer briser les murs de méfiance.

Trahison, le mot est lâché. Dans le marigot politique du parti au pouvoir, le curseur navigue entre confiance et méfiance vis-à-vis des uns et des autres, et surtout des militants du PDCI-RDA, qui ont rallié le parti unifié RHDP.

Le recadrage de Jeannôt Ahoussou Kouadio

La sortie de Jeannôt Ahoussou Kouadio, ancien président du Sénat, avait mis le feu aux poudres et continue de mettre les puces à l’oreille. « Je suis fidèle au président Henri Konan Bédié et loyal au président Alassane Ouattara, » avait-il déclaré, au début de la crise entre les deux leaders, pour naviguer entre les deux eaux et jouer sur les deux tableaux.

Il suscita alors l’ire du président du directoire du RHDP, Adama Bictogo, qui avait menacé de lui arracher « le tabouret » s’il ne rentrait pas dans les rangs. Car c’est non à « un pied dedans et un pied dehors ». Et, ce fut chose faite pour ne pas connaître le sort de Soro Kigbafori Guillaume, contraint de démissionner de la présidence de l’Assemblée nationale. En effet, le mot « confiance » ne fait pas partie du vocabulaire politique, et surtout dans le panier à crabes du parti au pouvoir.

« Adjoumani et ses comparses« 

Après le divorce politique entre Alassane Ouattara et Henri Konan Bédié, de nombreux militants du PDCI-RDA ont répondu aux chants des sirènes du RHDP, à travers deux mouvements: « Sur les traces d’Houphouët-Boigny » et « PDCI-Renaissance », fondés respectivement par Kobenan K. Adjoumani et Daniel Kablan Duncan. Dans leur esprit, ils ont eu raison de trahir Bédié et le PDCI-RDA. Et c’est le péché originel, qui les place dans l’oeil du cyclone, avec des rapports passés à la loupe. Car autant qui a bu boira, autant qui a trahi trahira.

Le compagnonnage politique, sous des airs joyeux, est ainsi frappé de suspicions et de réserves. « Adjoumani et ses comparses », pour reprendre l’expression de l’ex-parti unique, l’ont bien compris. Ils se sont inscrits dans le rôle du « haut-parleur », sans faire de vague afin de rassurer.

Résultat, deux membres viennent d’être nommés au Sénat: l’ambassadeur Bernard Éhui Koutoua et Michel-Benoît Coffi. Le leader de « Sur les traces d’Houphouët-Boigny » et Koffi Kouakou Amédé (ministre de l’Équipement et de l’Entretien routier) ont été reconduits dans le gouvernement mené par un technocrate sans ambition politique et donc homme-lige: Robert Beugré Mambé Robert.

Un crime de lèse-majesté que pourrait commettre Claude-Paulin Danho

C’est le point de fracture avec les animateurs du « PDCI-Renaissance ». Ils refusent de jouer les seconds rôles au risque d’être vus comme des Iznogoud, des califes qui veulent prendre la place du calife. Et ils en paient le prix. Daniel Kablan Duncan a démissionné, le 8 juillet 2020, de son poste de vice-président de la République parce que sa candidature pour briguer la magistrature suprême, en 2020, a été refusée au profit du Premier ministre Amadou Gon Coulibaly.

Et c’est l’effet domino. Raymonde Goudou-Coffie, Pascal Abinan Kouakou, Jean-Claude Kouassi, Alain-Richard Donwahi, Félix Miézan Anoblé ont quitté le gouvernement. Diéméléou Amon Bilé a été viré de la direction de l’ARTCI. Jérôme-Patrick Achi vient de boucler la boucle. Il a été débarqué de la primature. Lui aussi, soupçonné de velléités politiques, a commencé à lorgner la succession d’Alassane Ouattara à la tête de l’État.

C’est un crime de lèse-majesté que pourrait commettre Claude-Paulin Danho. Ayant perdu son portefeuille de ministre des Sports à la suite du scandale au stade olympique d’Ébimpé, il refuse de s’en laisser conter. Il organise ou fait organiser des manifestations de soutien des populations d’Attécoubé, sa commune, qui virent ouvertement à la défiance.

F. M. Bally

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