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Affi N’guessan, Kablan Duncan, Anaky Kobena, Mabri Toikeusse, Amon Tanoh...: Ces transfuges et partenaires du RHDP «pressés » et jetés à la poubelle

Economie et Politique

Affi N’guessan, Kablan Duncan, Anaky Kobena, Mabri Toikeusse, Amon Tanoh…: Ces transfuges et partenaires du RHDP «pressés » et jetés à la poubelle

En Côte d’Ivoire, il en va de la vie des hommes, surtout des hommes politiques comme celle de tous les éléments de la nature. Tant que leur utilité est avérée et n’est pas discutée, et que l’on peut s’en servir, on leur voue admiration en mettant en exergue le caractère nécessaire de leur existence. Bien plus, tout est mis en œuvre pour faire croire que la vie ne peut se concevoir sans leur présence, ou que les choses ne peuvent plus être telles qu’elles sont s’ils n’avaient pas existé.

Mais dès lors qu’il est possible de se passer d’eux, ou que leur utilité n’est plus d’une absolue nécessité, c’est sans état d’âme qu’on les laisse choir, et qu’on fait même l’effort d’oublier qu’ils ont été utiles à quelque chose, ou même qu’ils ont existé. Beaucoup d’hommes politiques ivoiriens ont connu ce parcours depuis 2011 dans leur cheminement avec le Rdr devenu Rhdp. Et les exemples sont légion.

Il faut le reconnaître, les responsables du Rhdp ont très vite cerné la psychologie de nombre de personnalités politiques de notre pays. Très peu sont ceux qui peuvent vivre hors des ors et lambris dorés qu’offre le sillage du pouvoir. L’inconfort matériel du voyage dans le train de l’opposition, l’incertitude de ce que demain sera fait, et les difficultés liées au quotidien des opposants ont très vite raison de ces opposants qui s’offrent pieds et mains liés au Rhdp.

Ils ne sont pas nombreux ces opposants, à avoir la culture de l’opposition qu’on acquiert dans l’adversité, au fil des obstacles franchis, des privations endurées, et de l’humiliation qui rime avec la vie de l’opposition. Exploitant habilement cette réalité, le Rhdp a réussi à rallier à lui, des hommes politiques de l’opposition dont souvent, il n’a aucunement besoin des services.

Ainsi, au plus fort du bras de fer entre Affi N’guessan et Laurent Gbagbo pour le contrôle du Fpi, le Rhdp a encouragé en sous main, le premier dans sa défiance au fondateur du parti, défiance qui logiquement devait se terminer devant les tribunaux et finir par l’humiliation de l’ancien président, et partant sonner le glas de son parcours politique.

Que deviendra le partenariat entre le Rhdp et le Fpi ? Quel est l’avenir politique d’Affi Nguessan ?

Une fois, le schisme consommé dès lors que Laurent Gbagbo a contourné l’obstacle en laissant le Fpi à Affi pour créer le Ppa-ci, le Rhdp, satisfait qu’une partie de l’objectif ait été atteint, s’est replié de façon stratégique pour laisser venir à lui Affi N’guessan et le Fpi.

Celui-ci ne tardera pas à mettre en œuvre sa «technique d’approche » (TAP), en sollicitant une alliance avec le Rhdp. Il se heurta à une fin de non-recevoir, le président du Rhdp estimant que leurs deux partis n’étaient pas de la même obédience idéologique. Sans se décourager, Affi remit le couvert pour obtenir à la veille de l’élection couplée des municipales et des régionales, un « partenariat » devant lui assurer visibilité et existence.

Malheureusement, il perdit les élections dans le Moronou, et à la formation du nouveau gouvernement, aucun strapontin ne fut proposé au Fpi. Comment pouvait en être autrement ? Très calculateur et ayant gagné au change, pourquoi le Rhdp s’encombrerait-il du Fpi, qui en l’état actuel des choses, ne lui est d’aucune utilité ? Que deviendra le partenariat entre le Rhdp et le Fpi ? Quel est l’avenir politique d’Affi Nguessan ? Demain nous situera.

La déception de Duncan fut à la dimension de ses attentes

Au moment de la transformation du Rhdp, groupement de partis politiques, en Rhdp parti unifié, de nombreuses personnalités du Pdci-rda étaient en transe, et jouaient des coudes pour fondre le plus vieux parti du pays dans le parti naissant. Deux mouvements virent le jour en leur sein : le Pdci Renaissance et Sur les traces d’Houphouët. Les animateurs de ces courants dans leurs relations avec et à l’intérieur du Rhdp ont connu des fortunes diverses. 

Mais le Rhdp est resté constant dans sa stratégie : tirer le maximum de ces transfuges et les laisser choir quand il le faut. Cela ne fut pas difficile. Dans l’imagerie populaire des Ivoiriens, les personnalités politiques du Pdci-rda sont des « bourgeois » qui ne sauraient supporter la vie austère des opposants et partant ne sauraient résister au chant de sirène du Rhdp.

Dans l’euphorie, de nombreux postes de responsabilités leur ont été attribués. Il en est ainsi de Daniel Kablan Duncan, promu Vice-président de la République, et dauphin constitutionnel du chef de l’État à cette période. Mais dans le compagnonnage, le vice-président qui, avec d’autres cadres entendaient faire renaître le Pdci-rda dans le Rhdp, se frottait les mains, dès lors que le président du Rhdp avait affirmé ne pas remettre le couvert pour un troisième mandat, avant de se rétracter.

La déception de Duncan fut à la dimension de ses attentes. Marginalisé, et contraint d’inaugurer les chrysanthèmes, comme chanter « joyeux anniversaire » pour nos hôtes de marque, il fut poussé à la démission et disparut du champ politique ivoirien. Qui se souvient encore de lui ? Mais pour le Rhdp, la vie continue…

Le sort réservé aux transfuges qui déposent leurs bagages dans la « case ronde », après avoir été utilement « pressés » comme du citron et jetés à la poubelle, n’est pas nouveau.

Le Rhdp a la rancune tenace

Qui ne se souvient pas d’Anaky Kobena, membre fondateur du Fpi de Laurent Gbagbo, puis son pourfendeur pour le bonheur du Rdr-Rhdp ? Quid de Gnamien Konan ? Qui a oublié Mabri Toikeusse dont les allers et retours au Rhdp dénotent d’une inconstance qu’exploite merveilleusement le Rhdp ? Celui-ci ne lui fait aucunement confiance, mais joue le jeu et quand viendra le moment, le laissera choir sans émotion.

Le cas le plus singulier de l’inconstance des hommes politiques ivoiriens, caractérisée par leurs aller-retour au Rhdp, est celui de Marcel Amon Tanoh. On se rappelle que l’homme qui fit sensation au Stade Félix Houphouët-Boigny le 10 octobre 2020, en compagnie de l’opposition qu’il venait d’intégrer, n’y est resté que quatre mois. Il est allé à Canossa, juste après la réélection du chef de l’État, en se fendant d’une déclaration de reniement et de regret pour les propos tenus au cours du meeting de l’opposition en octobre 2020.

De retour à la maison, et après son mea culpa, il fut bombardé secrétaire exécutif du Conseil de l’Entente, une organisation sous-régionale, dont on se demande encore à quoi elle sert.

Oubliant que le Rhdp a la rancune tenace, il y fit des siennes et ce qui devait arriver, arriva. Démis de ses fonctions, il va sans dire qu’il se conjugue désormais au passé, et encore heureux s’il ne se retrouve pas devant les tribunaux, puis sombrer dans l’anonymat. Ainsi va le pays, et ainsi va le cheminement avec le Rhdp. Mais arrive le jour où l’ivraie sera séparée du vrai.

NAZAIRE KADIA 

Analyste politique

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