C’est un fait. L’ancien Président ivoirien Laurent Gbagbo est politiquement resté « bloqué » en 2010-2011 et à chacune de ses sorties, il remonte le temps en enfilant le costume de la victime. A Dabou le samedi 12 avril 2025, le président du PPA-CI a remis le couvert. Cette fois, au nombre de ses cibles, le Premier Ministre, Ministre des Sports et du Cadre de Vie, Robert Beugré Mambé qu’il a critiqué pour son rôle de président de la Commission électorale indépendante (CEI).
« Beugré Mambé avait déjà inscrit 400.000 noms alors que les opérations n’avaient pas commencé. Quand j’ai vu ça je l’ai renvoyé et j’ai demandé qu’on me propose un autre (…) », a déclaré en substance l’ancien chef d’Etat. La première incohérence de cette sortie de Laurent Gbagbo se rapporte aux conditions de départ de la CEI de Robert Beugré Mambé. Il est tout simplement faux de déclarer qu’il est celui qui a « renvoyé » l’ex-président de la Commission électorale. En effet, il était impossible pour Laurent Gbagbo de limoger un président de Commission qui avait été élu et non nommer par ses soins.
Ayant échoué à obtenir la démission de Robert Beugré Mambé, Laurent Gbagbo avait alors invoqué l’article 48 de la Constitution pour dissoudre le gouvernement et la CEI. Il n’a donc jamais été question de « renvoyer » l’actuel Premier Ministre. Pour ce qui est de cette scabreuse affaire des 400.000 personnes inscrites frauduleusement, il faut comprendre qu’elle est intervenue dans un contexte ou le camp Gbagbo très peu sûr de sa victoire à la présidentielle rechignait à aller à ce scrutin. Robert Beugré Mambé ne s’est jamais livré à cette tâche.
L’ancien représentant spécial des Nations Unies en Côte d’Ivoire, le coréen Y.J Choi, acteur majeur de cette période de l’histoire politique de la Côte d’Ivoire évoque d’ailleurs ces subterfuges dans son livre ,« La crise ivoirienne, ce quil fallait comprendre, jy suis, jy reste ».
« Rétrospectivement, on se rend compte que le camp Gbagbo a mal géré lopération, pourtant cruciale, denrôlement des électeurs. Et guère mieux le processus des réclamations. Il ne sest alarmé que tardivement, alors que la liste électorale était sur le point dêtre finalisée (…) Fin décembre, le président, prenant au sérieux les avertissements des barons de son parti, commença, semble-t-il, à se sentir mal à laise. Et à entrevoir le spectre de la défaite. Cest alors quil prit la lourde responsabilité de solliciter un nouveau report, proposition d’autant plus décevante quelle intervenait tardivement, alors que le processus était arrivé à son terme à lexception des derniers préparatifs techniques et logistiques. Pour justifier son revirement, il était prêt à tirer à boulets rouges sur une prétendue « liste Mambé », relate l’ancien fonctionnaire onusien.
Gbagbo digère mal le ‘’non’’ de Mambé
En clair, ces accusations n’étaient qu’un prétexte pour ne pas aller à l’élection et sans doute gagner du temps pour rattraper les manquements du camp présidentiel d’alors lors du processus d’enrôlement. Si Laurent Gbagbo cible particulièrement Robert Beugré Mambé, c’est aussi pour le refus que lui a opposé l’actuel Premier Ministre ivoirien. En effet, l’ex chef d’Etat avait manoeuvré pour « recruter » celui qui présidait la Commission électorale à l’époque.
Laurent Gbagbo était convaincu qu’avoir Robert Beugré Mambé « dans son sac » pourrait lui garantir une victoire à la présidentielle. Mais, le fondateur du FPI a fait chou blanc devant la ténacité du chef du Gouvernement et depuis, tel un prétendant éconduit, il digère mal ce refus qui a pourtant contribué au renforcement de la démocratie en Côte d’Ivoire.
Homme de foi reconnu, Robert Beugré Mambé a réagi en une phrase à ces accusations : « Je prie pour Gbagbo, il ne sait pas ce qu’il dit », a signifié le Premier Ministre.
Source: Le Patriote
