Créé en 2008 pour soutenir les équipes nationales de football du pays, le Comité National des Supporters des Éléphants de Côte d’Ivoire (CNSE) a été loin de remplir son rôle lors de la CAN 2023, organisée à domicile. En huitième de finale, face au Sénégal, il a été dominé dans l’animation par les supporters sénégalais qui ont fait plus de bruit et de couleur que les Ivoiriens.
La rencontre entre la Côte d’Ivoire et le Sénégal, le 29 janvier 2024, au stade Charles-Konan-Banny de Yamoussoukro, était l’une des plus attendues de la CAN 2023. Les deux équipes, parmi les favorites du tournoi, se sont livré un duel intense et serré, qui s’est soldé par une victoire des Éléphants aux tirs au but (1-1, 5-4).
Mais sur le plan de l’ambiance, il n’y a pas eu de match. Les supporters sénégalais, venus en nombre, ont fait entendre leurs tambours, leurs chants, et leurs encouragements du début à la fin de la rencontre. Le CNSE, en revanche, a été littéralement noyé par le Sénégal.
À peine audible, il n’a pas réussi à galvaniser les joueurs ivoiriens, ni à impressionner les adversaires. Au cours du match, on n’entendait que les tambours sénégalais, qui résonnaient dans tout le stade.
Humilié par les Sénégalais qui ont montré plus de passion, de créativité et d’organisation
Ce n’est pas la première fois que le CNSE est dominé par les supporters sénégalais. Déjà, lors de la CAN 2017, au Gabon, les Lions de la Téranga avaient éliminé les Éléphants au premier tour, avec le soutien de leurs fans. Mais cette fois-ci, la défaite est encore plus amère, car elle a eu lieu sur le sol ivoirien.
Le CNSE qui se targue d’être le meilleur groupe de supporters d’Afrique, a été humilié par les Sénégalais qui ont montré plus de passion, de créativité et d’organisation. À suivre le match à la télévision, on se croirait dans un stade à Dakar.
Jamais les supporters ivoiriens n’auraient pu faire pareil à Dakar. Par ailleurs, le CNSE n’a pas seulement été inaudible, il a aussi été invisible. Alors que les supporters sénégalais arboraient fièrement les couleurs de leur drapeau (vert, jaune, rouge), les supporters ivoiriens étaient dispersés dans les tribunes, sans aucune coordination ni harmonie.
Combien de supporters du CNSE étaient présents au stade de Yamoussoukro ?
Le CNSE qui dispose pourtant d’un budget conséquent, n’a pas su fournir des accessoires (maillots, écharpes, drapeaux, banderoles, etc.) à ses membres, ni créer des animations visuelles. Le contraste était flagrant entre les deux camps et le CNSE a donné l’impression d’être un simple spectateur, et non un acteur du match.
En outre, le CNSE revendique plus de 10 000 membres, répartis dans tout le pays et à l’étranger. Il compte également des sections régionales, des antennes locales, et des représentations diplomatiques.
Mais ces chiffres sont-ils réels ? Combien de supporters du CNSE étaient présents au stade de Yamoussoukro ? Combien ont fait le déplacement pour les autres matchs de la Côte d’Ivoire ? Combien sont prêts à payer leur cotisation, leur billet, et leur hébergement pour suivre les Éléphants ?
Veiller à ce que le CNSE dispose des moyens nécessaires
Le CNSE semble avoir du mal à mobiliser ses troupes, et à fidéliser ses adhérents. Il souffre d’un manque de transparence, de communication, et de dynamisme. De plus, le CNSE ne peut pas être le seul responsable de cette situation.
Le Comité d’Organisation de la Coupe d’Afrique des Nations 2023 (COCAN) et la Fédération Ivoirienne de Football (FIF) doivent aussi s’impliquer efficacement pour aider le CNSE dans sa mission.
Le COCAN, qui est chargé de la coordination générale de l’organisation de la CAN 2023, doit veiller à ce que le CNSE dispose des moyens nécessaires pour assurer une bonne animation des stades.
La FIF, qui est l’instance dirigeante du football ivoirien, doit également soutenir le CNSE, qui est son partenaire privilégié, et favoriser la collaboration entre les différents acteurs du football.
Le COCAN et la FIF ont une responsabilité devant l’inefficacité du CNSE, et doivent rendre des comptes aux supporters ivoiriens.
Enfin, si nous voulons que nos joueurs sur le terrain soient à la hauteur, il faut que l’animation dans les gradins soit digne de ce que l’on voit avec Liverpool en Angleterre. Pourtant, l’animation des stades depuis le début de la compétition laisse à désirer.
Il faut renouveler les dirigeants du CNSE qui semblent déconnectés des réalités du terrain et des attentes des fans
Lorsque les Éléphants jouent, les supporters sont plus spectateurs que supporters. Ils ne créent pas l’ambiance, ni la ferveur, ni la pression nécessaire pour pousser leur équipe vers la victoire.
Tout cela doit être coordonné par le COCAN, la FIF et le CNSE, qui doivent s’inspirer des meilleures pratiques en matière d’animation des stades.
Liverpool, par exemple, est réputé pour son célèbre Kop, qui chante à l’unisson le You’ll Never Walk Alone, et qui fait d’Anfield un stade mythique. Le CNSE, qui a été créé pour être une force de soutien aux Éléphants, est pour l’instant, une source de déception pour les supporters ivoiriens.
Face au Sénégal, il a montré ses limites, son inefficacité et son amateurisme. Il est temps de réformer cette structure, de la rendre plus professionnelle, plus dynamique, plus créative, et plus représentative.
Il faut aussi renouveler ses dirigeants qui semblent déconnectés des réalités du terrain et des attentes des fans. Le CNSE doit se remettre en question et se réinventer, s’il veut retrouver sa place de meilleur groupe de supporters d’Afrique.
Ahouman Gaël Lakpa, écrivain, poète, et analyste politique.